La compétitivité ne s’obtient pas en déversant des montagnes de cash
Lors du dernier Conseil européen, les 27 ont peiné à s’entendre sur le plan industriel proposé par Bruxelles. Ils ont en revanche entériné son « choc de simplification » de l’environnement réglementaire auquel sont confrontées les industries vertes. En quoi cela consiste-t-il ?
C’est une excellente nouvelle. Il s’agit premièrement de simplifier les autorisations de projets d’infrastructures vertes, d’énergies renouvelables notamment, et donc de réduire les incertitudes inhérentes à ces processus administratifs ; deuxièmement, de faire fonctionner les aides d’Etat déjà autorisées par l’Europe de manière plus efficace et lisible. En plus de déployer des sommes massives, l’Inflation Reduction Act (IRA) a l’avantage de la simplicité. Alors qu’en Europe, les entreprises dépensent des ressources considérables pour essayer de comprendre à quelles aides elles sont éligibles, quelles démarches entreprendre, combien de temps durera le processus... cela aussi crée énormément d’incertitude.
Comment analysez-vous la réponse de l’Union européenne face à l’IRA ?
Voir le sujet comme une course aux subventions avec les Etats-Unis dont dépendrait notre compétitivité, comme c’est souvent le cas en Europe, est une erreur. Sur les voitures électriques, nous avons par exemple l’illusion que les Américains pourraient devenir les exportateurs dominants, alors qu’en réalité, environ 80 % des ventes dans le monde sont des véhicules produits localement. De la même manière, le fait que des infrastructures d’énergies renouvelables soient construites aux Etats-Unis n’empêche pas que cela ait lieu en Europe. Si les conditions sont réunies, les investissements privés arriveront ici aussi, quoi qu’il en soit. Peut-être simplement qu’ils auront lieu d’abord aux Etats-Unis mais est-ce une mauvaise chose ? Il y a en réalité de bonnes raisons de vouloir être second. L’Europe peut bénéficier des économies d’échelle développées outre-Atlantique pour ensuite adopter les technologies à moindre coût.
Plus généralement, il faut arrêter de penser que la compétitivité s’obtient en déversant des montagnes de cash. Les investissements dépendent bien plus de l’attractivité de l’environnement réglementaire que des subventions disponibles à court terme. Renforcer la compétitivité de l’Europe nécessite donc de se concentrer sur les éléments plus « ennuyeux ». Les faiblesses sont connues : un manque de digitalisation de l’économie, le recours excessif au financement par les banques, par exemple. Faire des progrès sur le projet d’Union des marchés de capitaux devrait être la vraie priorité.
Zach Meyers, chercheur du Centre for European Reform, spécialiste de la politique industrielle et de la concurrence.